Hier, première nuit de l'été et son rituel institué. La nuit la plus longue de l'année, si je ne me trompe pas. Quelque chose qui se doit d'être célébré, en tout cas. En fin de journée, coups de téléphone croisés, qui fait quoi, où, comment et avec qui ? Belleville avec Repier et Keul ? Un concert punk déjanté quelque part avec Thib ? Milian et plein de gens à Rivoli ?
Paris impose l'éparpillement géographique des forces et le temps qu'il faut pour naviguer entre elles. À 21h30, en route pour bastille, je décide et d'un, de ne pas vouloir tout faire, et de deux, de refuser le choix. Ou plutôt de prendre résolument celui de la troisième voie, à savoir passer la soirée toute seule, personne à attendre, personne à rejoindre, et toute latitude pour déambuler au hasard du parcours. Mise en application radicale du précepte individualiste que m'a un jour inspiré el Lokoyuan, ou comment savoir se détacher du/des groupes, reprendre la posture du chat de gouttière, sans limitation de mouvement, avec comme seule contrainte l'envie du moment. Et au final, j'ai passé une très bonne soirée.

Trois kro dans le sac, je me suis baladée, de daumesnil à châtelêt, slalomé entre les gens bourrés, guidée par l'oreille, j'ai consciencieusement fui les groupes de rock pour finalement atterrir dans le marais, au coin de la rue des mauvais garçons, devant un bar gay où je suis restée plusieurs heures, à me trémousser sur "toute la variet' que j'aime". Femme des années 80, Sans contrefaçon, Can't get you out of my mind... bref, caricature en bonne et due forme d'un "club guiri gay" à laquelle j'ai eu un malin plaisir à me laisser aller. Parce que gratuit et en plein air - sous la pluie, qui plus est. Certes, voir autant de personnes se déhancher sur Bécassine, c'est ma cousine, m'a fait un brin douter... mais bon, l'idée était simple, se faire plaisir, alors j'ai laissé de côté tout ce que je peux penser de cette culture consumériste gay, le peu de "révolutionnant" dans tout cela, le ridicule, qui ne tue certes pas. J'ai juste kiffé, comme on dit dans le jargon. Dans ce tourbillon de futilités, je me suis faite dragouillée par quelques filles ; en tout bien tout honneur et seulement avec les yeux, je suis tombée en amour d'une meuf trop belle, à qui j'aurais aimé parler, si j'avais osé. Note pour plus tard : si j'aime encore les garçons, malgré les complications, c'est peut-être parce que je suis un peu gay, au fond (yoyo).

À minuit et demie, fin du joyeux bordel, "parce qu'il faut penser aux voisins", j'ai poussé jusqu'à la place du bellay, pour un peu de samba et de comandante che guevara. Je me fais alpaguer par un type. Il me dit qu'il cherche la fée clochette, que peter pan a disparu à montmartre et que présentement, bien qu'il le soupçonne d'être au banana café, il ne peut mettre la main sur le capitaine crochet. Doute de mon côté. Il est très sérieux, mais je ne vois pas comment je peux l'aider...

2h, fin de soirée. Juste le temps d'attraper Thib au vol, d'éviter avec lui les gerbes qui sortent sans crier gare, discuter avec un djeune qui après quelques années d'archi, va partir à l'armée de terre... "pour être cartographe, t'as vu, c'est plutôt cool", en faire halluciner quelques autres quand ils me voient pisser debout dans un coin ("ben, elle fait quoi, là ?!"), et je reprends tranquillement le chemin inverse, de châtelêt à daumesnil, du boboland à mon lit.

Ce matin, du mal à me lever, légère gueule de bois, la kro est traître (l'accro est traître?!). Le vide attendu après tant de dérisoire. Faut reprendre une activité normale, comme ils disent. J'y vais.